XAVIER PRIVAS
N^
U dVof 0
PARIS
LIBRAIRIE
OLLENDORFF
1903
^llllllllPl
3900300350816-1
TAUA
'^;
CHANSONS
VÉCUES
DU MEME AUTEUR
Pour les Fêtes, i album (Illustrations de Tardieu).
Chansons Humaines, i album (Illustrations de Tardieu;
Chaque recueil illustré du portrait de l'auteur, avec musique d'accom-
pagnement, prix net : 6 fr. (Laurens, éditeur, 4-5-6, Galerie du
Théâtre-Français) .
Chansons Chimériques, i vol. (couverture d'Edmond Gros).
Chansons de Révolte, i album.
Chansons d'Aurore, i album.
Les Mois, i album (Illustrations de François Kupka).
Pour paraître prochainement :
L'Amour chante, i vol.
Tous droits de traduction et de reproduction réservés pour tous les
pays, y compris la Suède, la Norvège, la Hollande et le Danemark.
S'adresser, pour traiter, à la librairie Paul Ollendorff, 50, Chaussée
d'Antin. Paris.
XAVIER PRIVAS
CHANSONS
VÉCUES
PAKIS
SOCIÉTÉ d'Éditions littéraires et artistiques
Librairie Paul OUendorff
50. CHAUSSÉE d'antin, 50
Tous droits
IL A ETE TIRE A PART
CINQ EXEMPLAIRES SUR PAPIER DE HOLLANDl
NUMÉROTÉS A LA PRESSE
Ai' 3!
1I03
Jenny et Joannès BARJOT
En témoignage de fraternelle affection.
CHANSONS POUR LA MORTE
PRESSENTIMENT
Andanlino
loiirs, Tan_dis qu'au de - hors le vent dhi.ver
)leure La gaî- té df . funte a _ vec les beaux
Chansons vécues
jours, FriJeux , te.nons - nous en _ la. ces et
i-ail
sourds A l'ap.pel ba . nal et tris-te de
l'heu - re
Pressentiment
En le joli nid de notre demeure,
O petite amante aux yeux de velours,
Tandis qu'au dehors le vent d'hiver pleure
La gaîté défunte avec les beaux jours,
Frileux, tenons-nous enlacés et sourds
A Tappel banal et triste de Theure.
Laisse ton regard, telle une phalène,
Se prendre aux lueurs de ce feu de bois,
Et prêtant l'oreille à la cantilène
Que le souvenir chante par ma voix,
En songe revis le temps d'autrefois
Où tout nous fut doux : amour, joie et peine !
Chansons vécues
C'est près des chenets, quand laflammey tremble
Comme un feu follet sur le passé mort,
Qu'aux amants vieillis, mais point las, il semble
Exquis d'évoquer le charme qui dort
En le lointain gris des ans, où le sort
Leur permit de vivre et d'aimer ensemble.
Nous avons gravi tous deux, côte à côte.
Ta petite main captive en ma main,
La cime d'amour si belle et si haute.
Nous ne sommes pas au bout du chemin ;
Qui sait ce que nous trouverons demain
Sur l'autre versant de la sainte côte?
Achèverons-nous en commun la route
Qui mène au pays jamais dépassé
Où la vérité triomphe du doute?
Ou bien Tun de nous, meurtri, harassé,
S'arrêtera-t-il au bord du fossé
Avant d*avoir pu la parcourir toute ?
Pressentiment
Mais en le cher nid de notre demeure
Fleurant le parfum des intimités,
Tandis qu'au dehors le vent siffle et pleure,
En rêvant, gagnons les lieux enchantés
Où Ton n'entend point le glas des Gaîtés
Que gémit l'appel sinistre de l'Heure !
Publiée avec l'autorisation de MM. RICORDI et C», éditeurs. 62.
boulevard Malesherbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
réserves pour tous pays.
L' AMANTE
Moderato
très do'j.
nour et fleur de souf - france, L'a-manJe re ,
, , s S . [y ^ ^ 1*^ N>—
là é è * f,* 1 * ' ' '' - -*-—
pose en na-tre niJ nu, Le mai qui ré .
. si . de en son corps menu,- A mis à son
front le charme in.gé - nu Qui J'au-re
iait aux jours de l'en - fan - ce; Sa voix a
jo Chansons vécues
naître au seuil in. eo - lo- re De sa- lèvre
rail.
mée une augUSte flore: CeJ.le des sou
rail. r\
res et des gaî . iê^s
L'Amante ii
Oiselet d'amour et fleur de souffrance,
L'amante repose en notre nid nu,
Le mal qui réside en son corps menu
A mis à son front le charme ingénu
Qui l'auréolait aux jours de l'enfance;
Sa voix a repris ses sons veloutés,
Son œil recouvré sa douceur d'aurore ;
Et voici renaître au seuil incolore
De sa lèvre aimée, une auguste flore :
Celle des sourires et des gaîtés.
Las ! pourquoi luit-il sur son cher visage
Ce reflet pâli du passé lointain ?
En ce renouveau du geste enfantin
Faut-il découvrir d'un malheur prochain
Le mystérieux et fatal présage ?
12 Chansons vécues
Et dans le caprice amer du destin
Qui, ressuscitant les anciens poèmes,
La nimbe à nouveau des vieux diadèmes^
Faut-il retrouver la loi des extrêmes
Qui fait le couchant pareil au matin ?
O l'impénétrable et triste mystère
Que celui de vivre, aimer et souffrir!
O la cruauté de naître et mourir
Dans l'angoisse obscure du devenir
Et de l'au-delà sans nom de la terre !
O l'âpre tourment de ne pas savoir
Si l'être adoré qui va disparaître
Aura quelque jour le don de renaître !
O l'horrible doute et l'amer peut-être,
Ces monstres affreux du jardin d'espoir !
Mais repose en paix, ô petite amante,
Car celui qui t'aime et qui te défend
Contre les assauts du mal triomphant,
Rit à ton sourire idéal d'enfant
Afin d'égayer ta vie inclémente.
L'Amante 13
Repose et souris, cependant que pour
Te mettre à Tabri de toute souffrance,
Il va te griser de l'aime fragance
Et de la prière et de l'espérance,
Ces vapeurs d'encens de son vieil amour.
Publiée avec l'autorisation de MM. RICORDI et Ci» éditeurs, 62,
boulevard IMalesherbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
réserves pour tous pays .
L INTRUS
Larg-o
;. , i.
A
1^ — K-
la
— N — 1
)op . te de
1 1 \)
mon
lo -
^y '^' '
jb=i:
^
-^ ^
*=i^
-J— J
gis De quelque sa. ta. m. que trappe, QucJ
- du, Je SUIS le ^rand se . nyeur de
i6
Chansons vécues
née. On y voit ger. mer la dou
leur, Et l'é . pou . vante et h
tr -==^ ~ ', ;t^ -^ ^ ^
- heur Et je pré . side au cours des larmes.
L'Intrus 17
A la porte de mon logis,
Impérieuse une main frappe.
Holà ! fantôme qui surgis
De quelque satanique trappe,
Quel es-tu ?
— Hôte toujours inattendu,
Je suis le grand semeur de deuil
Aux gages de la Destinée,
Et lorsque j'ai franchi le seuil
D'une maison prédestinée,
On y voit germer la douleur
Et l'épouvante et les alarmes.
Car je me nomme le Malheur
Et je préside au cours des larmes.
i8 Ch
ansons vécues
O toi dont le nom, tel un glas,
Frappe sinistrement l'oreille,
Pourquoi suspendre ainsi tes pas
Auprès de celle que je veille
A genoux ?
— Messager d'horreur, il m'est doux
De m'arrêter en mon chemin,
Pour accomplir la tâche infâme
D'emboucher l'infernal buccin
Qui sonne le départ d'une âme ;
Dis donc adieu, de par le sort,
Aux jours tissés d'or et de soie,
Cependant que ma sœur la Mort
Va sonner le glas de ta joie !
Publiée avec l'autorisation de MM. RICORDI et C», éditeurs, 62,
boulevard Malesherbes, Paris. Tous droits de traduction et reproductiou
résenés pour tous pays.
LA MORTE
Andnntino
très doux
- mante a clos sa pau - piere, Et voi - ci cou _
'he las-tre de ses yeux, AlTjii ciej a pep
20
Chansons vécues
ché l'astre de ses yeux.
La Morte 21
Ma petite amante a clos sa paupière
Et voici couché l'astre de ses yeux.
Mon ciel a perdu toute sa lumière
Et la nuit s'étend sur le cimetière
Où gît terrassé mon passé'joyeux;
Ma petite amante a clos sa paupière
Et voici couché Tastre de ses yeux.
Ma petite amante a clos son oreille
A tous mes appels, à tous mes sanglots,
Comme son regard, son esprit sommeille^
Et s'il est des mots par qui tout s'éveille,
Il faut être un Dieu pour savoir ces mots ;
Ma petite amante a clos son oreille
A tous mes appels, à tous mes sanglots.
22 Chansons vécues
Ma petite amante a fermé sa bouche.
Les baisers sont morts, au champ glorieux.
Et les rires d'or, au froid qui les touche,
Sont inanimés au creux de leur couche,
Tandis que s'éteint mon rêve avec eux -,
Ma petite amante a fermé sa bouche :
Les baisers sont morts au champ glorieux.
Ma petite amante a fermé son âm.e,
Adieu ma jeunesse et ma passion!
Hélas ! tout en moi meurt avec la flamme
Qu'attisait la main douce d'une femme
Sur l'autel sacré de l'Illusion ;
Ma petite amante a fermé son âme :
Adieu ma jeunesse et ma passion I
Publiée avec l'autorisation de INIM. RICORDI et C'^, éditeurs. 62,
boulevard Malesherbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
résenés pour tous pays.
LE SILENCE
Moderato
do Ici
V V v
Cap,en_fan . té par Je mai.
Le si - lence, OLseau des té
24
Ch
ansons vécues
Le Silence 25
Au fond de mon âme abattue,
Toute voix humaine s'est tue,
Voix de joie et voix de douleur;
Car, enfanté par le malheur,
Le silence, oiseau des ténèbres,
Impérieux, comme un vainqueur.
Couvre de ses ailes funèbres
Le labyrinthe de mon cœur.
Et pieusement je regarde
Celle qui, sous ma sauvegarde.
Repose dans rÉternité.
Puis, vaincu par la majesté
Qui se dégage du silence
En de mystérieux parfums,
Je m'agenouille, prie et pense
A la splendeur des ans défunts.
26 Chansons vécues
Penche-toi donc, ô ma pensée,
Sur la page presque effacée
Du livre d'or de mon passé,
Afin qu'en mon cerveau blessé
S'immortalise la mémoire
Du doux temps qui vient de finir,
Et qu'en ressuscite la gloire
Au creuset de mon souvenir.
Renaissez, mes jeunes années,
Vous qui fûtes illuminées
De mille feux d'enchantement;
Renaissez, durant un moment,
Parmi l'éclatante cohorte
•De mes rêves réalisés,
Pour qu'avec vous, j'offre à la Morte
L'holocauste de mes baisers.
Comme un prestigieux trophée,
Emporte, ô ma petite fée.
En l'inconnu qui s'ouvre à toi,
Ma jeunesse, mon cœur, ma foi
Le Silence
Car il faut que tu sois suivie
Au royaume de vérité,
Par ce qui fut toute ma vie :
Ma poésie et ma beauté !
Publiée avec l'astorisation de MM. RICORDI et C'^ éditeurs, 67,
boulevard Malesherbcs, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
résorbés pour tous pays.
LA MISSION
Moderalo
y dolcf
c\ tiin H - mt» par - ve . ou
Ch
lansons vécues
Ta mission est accomplie.
Muse jolie,
Et dans le pays inconnu
D'où nul mortel n'est revenu.
Voici ton âme parvenue.
Ta mission dévotieuse
Fut glorieuse ;
Car tu m'enseignas la beauté
De l'amour, et la volupté
De la souffrance souhaitée.
Car tu me guidas par les sentes
Efflorescentes,
Où les capricieux baisers
Sont des oiseaux apprivoisés
Buvant nos larmes pour rosée.
La Mission ^j
Car, nouvelle Samaritaine,
Vers la fontaine
D'où coulent le rêve et l'espoir,
Tu m'entraînas et me fis seoir
Pour qu'en tes mains je pusse boire.
Et d'amant, devenu poète,
A la conquête
Du grand Idéal méconnu,
Je marchai, par toi soutenu,
Et je m'élevai dans la nue !
Sois donc glorifiée, ô femme,
Dont la belle âme
Fut le soleil par Dieu choisi
Pour inonder mon cœur transi
Des rayons de sa poésie.
Sois sanctifiée, ô maîtresse,
Dont la tendresse,
Lys mystique au pollen royal,
Enorgueillit mon floréal
De sa fragance triomphale.
32 Chansons vécues
Ta mission est accomplie,
Muse jolie :
Seul me voici redevenu.
Retourne au pays inconnu
D'où ta chère âme était venue !
Publiée avec T autorisation de MM. RICORDI et C'e, éditeurs, 62
boulevard Malesherbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
résenés pour tous pays.
SOLITUDE
Andanl*
tri' s rion.T
seul Au nid dé-ser - té par Ja quié.tu
poir et d« s'j . Ji . tu - d«
34 Chansons vécues
Ma mie est partie et je reste seul
Au nid déserté par la quiétude ;
Mon rêve défunt gît en un linceul
Fait de désespoir et de solitude.
A mes pieds je vois gésir, terrassés,
Telles les ruines de ma jeunesse,
Les vestiges chers des bonheurs passés
Par la Mort sapés avec ma maîtresse.
En mon pauvre esprit, Douleur, tu te plais
A faire germer de tristes pensées,
Pendant qu'incliné je pleure et me tais
Devant mes illusions renversées.
Solitude 35
Mais voici surgir triomphalement
Au sommet moussu de tous ces décombres,
Une noble fleur au parfum calmant,
Lys mystérieux de l'Eden des Ombres.
Fleur du souvenir, parfum des parfums,
Dictame vainqueur de la lassitude,
Réveillés par toi, les cycles défunts
Seront les amis de ma solitude.
Publiée avec l'autorisation de MM. RICORDl et C^", éditeurs, 62,
boulevard ^Malcsherbcs, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
réserves pour tous pays.
PRIERE
Andanlino
très doux
Ou e\i cruci.fi.é l'A
38 Chansons vécues
Je vais continuer la route
Que tu n'as pu parcourir toute,
Chère voyageuse d'un jour ;
Et je vais gravir, solitaire,
La rude côte du calvaire
Où gît crucifié l'Amour.
Et dans ma course douloureuse,
Sur la montagne ténébreuse,
Je n'aurai plus, comme autrefois,
Afin de reposer ma tête,
Faible sous l'humaine tempête,
Le soutien berceur de tes doigts.
Prière
Et puis, si j'ai soif de tendresse,
Ou si j'ai faim d'une caresse,
Et si mes sens en sont brisés,
Je n'aurai, pour vaincre ma peine,
Ni ta vivifiante haleine,
Ni tes réconfortants baisers.
Mais ta chère âme transformée,
N'est plus chrysalide enfermée
Dans une enveloppe de chair,
Et, peut-être, voltige-t-elle
Invisible, immatérielle,
En le mystérieux Ether!
Petite âme de ma maîtresse,
Sur l'Océan de ma détresse,
De ma barque sois le nocher,
Et ma vie ainsi protégée,
Atteindra son fier apogée
Sans se briser contre un rocher !
Publiée avec l'autorisation de MM. RICORDI et C'", éditeurs, Ô2,
boulevard Malcsbcrbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
réservés pour tous pays.
CONSOLATION
Moderato
dolce
Du . pant ta vie, a .près la
42 Chxnsons vécues
mort
^ , U \ \ \\ h N J' h I
'^ '0 • J- » I # *
le, Je t
a. vais con - sa. crée i
;ur; Al. mer con . so , le!
Coiisolali'on 43
Je t'ai sincèrement aimée,
O toi dont l'âme s'est fermée
Sous le geste hautain du sort.
Durant ta vie, après ta mort,
Je t'ai sincèrement aimée !
Pour anéantir la rancœur
De l'existence malévole,
Je t'avais consacrée idole
Sur le piédestal de mon cœur ;
Aimer console I
Je t'ai pieusement pleurée,
O toi qui vers l'Ile ignorée
Où règne l'éternel repos ,
A fui sur la mer du Chaos;
Je t'ai pieusement pleurée I
Les jours sont défunts, où tes ris
Me grisaient de leur chanson folle,
L'ouragan a brisé l'idole
Et j'ai pleuré sur ses débris;
Pleurer console î
44 Chansons vécues
Je t'ai dévotement priée,
O toi dont Tâme était liée
■ Par les doux liens de la foi
A l'âme qui demeure en moi.
Je t'ai dévotement priée !
Et cette âme qui, pour jamais,
Sur les sommets infinis vole,
Sera la protectrice idole
Que je supplierai désormais;
Prier console 1
Je t'ai mystiquement chantée,
O toi par qui fut enchantée
L'heure sainte de mon passé!
Dans l'exil où tu m'as laissé,
■ Je t'ai mystiquement chantée !
De mon bonheur enseveli,
Tu n'es plus que le cher symbole
due j'ai paré comme une idole
D'un talisman contre l'oubU ;
Chanter console !
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 39,
faubourg Saint-Martin, Paris.
ANNIVERSAIRE
Moderato
S 2
-^r— — ] — ^^— ^
nei.ge s'est a. mon. ce
46
Ch
laiisons vécues
de.vant ce qui res- te deJ
? ' r ,'
-y — p 7-
pos-tu.re du sup.pli . ant.
Aufiiversaire j\j
La neige s'est amoncelée
Sur celle qui s'en est allée
Vers la ténèbre du néant.
Et devant ce qui reste d'elle
Je prends, adorateur fidèle,
La posture du suppliant.
Cependant que la neige tombe,
Mes yeux attachés à sa tombe
Laissent choir en pleurs mon regret.
Et voici que cette rosée
Ranime la flore épuisée
Qui meurt en mon jardin secret.
48 Chansons vécues
Ouvrez vos ailes, mes pensées,
Au bosquet des joies effacées
Les fleurs renaissent sous mes pleurs.
Ouvrez vos ailes, et, pareilles
A de vagabondes abeilles,
Buvez le parfum de ces fleurs.
C'est le parfum de l'heure exquise
Où l'âme amoureuse se grise
D'éphémères réalités.
C'est le parfum de Theure ancienne
Où la nôtre chantait l'antienne
Des fugitives voluptés !
En dépit de la Destinée,
Petite amante qu'a fanée
L'horrible souffle du trépas,
J'ai conservé de ce naguère
En mon cœur, secret reliquaire.
Un parfum qui ne mourra pas.
A 7in IV ers aire 49
Évocateur de ta jeunesse,
De ta beauté, de ta tendresse,
Ce dictame qui vit en moi,
Pour célébrer l'anniversaire
De l'heure où tu quittas la terre.
Je viens le respirer vers toi !
Publiée avec l'autorisation du Journal riUtistration, i3, rue Saint-
Georges.
CHANSONS POUR L'AMANTE
AUBADE A L'AMANTE
Andanlino
0 . ^
dolce ^ ^
&)?\l ' ■ -
N / ; /
_l^Z_ii 1
-#-
L'au. be s'est ](
— S p< n I j _ ^' .
é * ' ' ' r — / b " ^
.•ée et vosyeux sont clos, L'au.be s'est le
vee et vo.tre pen . sée, Par les son_g€
-Y ' r
d'op molJe_ment pous . sée Sur le lac mu
54
Chansons vécues
n
- sir d'è-tre ca.res - see Par le r^th-me
Jent de ses cal-mes eaux.
Aubade à l'Amante 55
L'Aube s'est levée, et vos yeux sont clos,
L'Aube s'est levée et votre pensée,
Par les songes d'or mollement poussée
Sur le lac muet du divin repos,
Goûte le plaisir d'être caressée
Par le rythme lent de ses calmes eaux.
Près de vous j'attends, discret et courtois,
Que, las des douceurs de la somnolence,
Tel un vagabond, librement s'élance
Hors des profondeurs obscures du bois
Où règne en tyran l'orgueilleux Silence,
Ce mélodieux oisel : votre voix.
56 Chansons vécues
L'Aube s'est levée, annonçant un jour
Fait de volupté, de splendeur, de joie,
De vos yeux fermés,, les portes de soie
Sous les doigts d'Éros vont s'entr'ouvrir, pour
Qu'en leur ciel d'azur à nouveau flamboie
L'astre qui créa ce fruit : mon amour.
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, Sg,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LE REVEIL DE L'AMANTE
Mod*'^
M* de Mazurka
N ». S-
- moup, deux fleurs sont é . cJMses,Pui;i:[ue mon
"tr—^ — w—é^ — w—^ z^ — ^
. sami des me.ta.mor- phoses Goûte aux surs nou
rail
-y . N ^ V
. veaux qui lui sont of . ferts.
Chansons vécues
Au Jardin d'Amour, deux fleurs sont écloses,
Puisque mon amie a les yeux ouverts,
Et que tout l'essaim des métamorphoses
Goûte aux sucs nouveaux qui lui sont offerts.
Au verger d'Amour, une fraise est mûre,
Puisque mon amie, ouvre en un souris
Sa lèvre où le sang jette avec usure
La pourpre et l'éclat de son coloris.
Au Bosquet d'Amour, une oiselle chante,
Puisque mon amie, en frôlant mes yeux,
Gazouille des mots exquis, qu'elle invente
Pour me convier aux plus doux des jeux.
Le Réveil de l'Amante
59
Au Pays d'Amour, le soleil se lève,
Puisque mon amie a fui l'enchanté
Paradis lointain où règne le Rêve,
Pour vivre avec moi la Réalité 1
Publiée avec Tautorisation do M. DIGOUDÉ-DIODET, éditeur, 3q
faubourg Saint-Martin, Paris. '
LES CHEVEUX DE L'AMANTE
Moderato
doîce
cheveux sont des ra-j'ons d'or Qu'Eros a, pour
dieu,
pris par
rail. .
le
som . n
oeil
— r
Ne
—^
i
veiLlait plus sur son tré . sor
62 Ch
lansons vécues
Tes cheveux sont des rayons d'or
Qu'Eros a pour toi ravis au soleil,
Un soir que ce Dieu, pris par le sommeil
Ne veillait plus sur son trésor.
Tes cheveux sont un lourd manteau
Qu'Éros a, pour toi, de ses mains tissé
Et dont sur ta nuque, il a déversé
Le splendide et royal fardeau.
Pour consacrer ta royauté
Dont la gloire abat l'orgueil de Cypris,
Je veux parsemer d'albes fleurs de lys
Ce péplum d'or de Volupté.
Les Cheveux de IWmante 63
Et je veux récolter ces fleurs
Sur les bords sacrés du lac enchanté.
Où, par les Désirs, mon cœur est porté
Loin des Soucis et des Douleurs !
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDÉ-DIODET, éditeur, 3g,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LE FRONT DE L AMANTE
Moderalo
front, en fou. le près . se . e, Les
pa.piJ.lons de ta pen . se . e, Vu
6G
Chansons vécues
ti . tes fleurs du dé- . sir
Le Front de l'Amante 67
Sous ton joli front, en foule pressée,
Les papillons de ta pensée
Volent au gré de ton plaisir ;
Et ces vagabonds, nés de tes caprices.
S'abreuvent à tous les calices
Des petites fleurs du désir.
Sur ton joli front, j'ai, de mes caresses,
De mes espoirs, de mes tendresses.
Établi les doux bataillons;
Et ces oiseleurs vont, à leur passage,
Pour les gagner à mon servage,
S'emparer de ces papillons.
68 Chansons vécues
Vers ton joli front, en troupe massée,
Les papillons de ma pensée
Sans tarder se dirigeront,
Quand j'aurai donné, comme ultime asile,
Mon âme à l'armée indocile
Des vaincus qu'ils remplaceront.
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 39.
faubourg Saint^Martin, Paris.
LES YEUX DE L'AMANTE
Moder.iln
3 <loU
. giques Leurs cijs voi - lent d^s diAi
Chansons vécues
mè - res; Mes sœurs. D'a_manl.
4
Les Yeux de l'Amante
Tes yeux sont des fleurs mystiques
Poussant en 1 Eden d'Amour,
Bleus, gris ou verts, tour à tour.
Tes yeux sont des fleurs magiques I
Leurs cils voilent des douceurs,
Leurs cils couvrent des colères,
Leurs cils cachent les Chimères,
Mes sœurs.
Tes yeux sont des sources claires
D'où jaillit la Volupté,
Et je bois à ce Léthé
L'oubli des sottes misères !
Ce sont des ensorceleurs.
Habiles en Théurgie,
Qui répandent la magie
Des pleurs.
Chansons vécues
Tes yeux sont les douces voies
Qui conduisent à ton cœur,
Castel où chante le chœur
Des mystérieuses Joies !
Tes yeux cèlent un aimant
Qui rive à ta fantaisie,
Mon rêve et ma poésie
D'amant !
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 39,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LES LÈVRES DE L AMANTE
Moderato
Ja -lou-S'î d'is fieups de Mai,
phra - ses,
y *^ ^ ^ )^ ^
Et des mots vo-iup.tu .
74
Chansons vécues
, eux, Aux naoments tu-muJ>.ta -
vall. , Tçr fjn,r ^
De nos ex . ta. ses
Les Lèvres de V Amante
Je sais un nid parfumé,
Jalousé des fleurs de Mai,
Où l'Amour a renfermé
L'essaim des phrases
Et des mots voluptueux,
Qui volent, impétueux,
Aux moments tumultueux
De nos extases. .
Je sais un nid enchanté,
Jalousé des fleurs d'été.
Où se grisent de gaîté
Les jolis rires,
Et les cris mélodieux.
Qui volent, capricieux,
Aux instants prestigieux
De nos délires.
76 Chansons vécues
Je sais un nid idéal,
Orgueil du doux floréal,
D"où s'échappe un triomphal
Vol de morsures,
De caresses, de baisers;
Aux moments divinisés,
Où tous nos sens sont grisés
Par les luxures.
Ce nid d'où s'envolent ris,
Caresses, morsures, cris.
Phrases tendres, mots fleuris.
Dompteurs de fièvres,
Ce nid, où le plaisir naît,
Ce nid, entre tous parfait,
O mon amante, fut fait
Avec tes lèvres I
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LA VOIX DE L'AMANTE
Mo de rai 0
3
trè^ don:
-tr — ^—
neu - pe
La chaiLson des an.t>ans dé
V ^ 7-
R*^_veiJJe en moi tous les par
rail.
ftiras Des vieil - les ht
7 8 Chansons vécues
Ta voix est la harpe qui pleure
La chanson des antans défunts,
Dont la tonalité mineure
Réveille en moi tous les parfums
Des vieilles Heures.
Ta voix est la brise qui chante
La cantilène des amours.
Dont la mélodie entraînante
Avive de nos présents jours
Les Heures lentes.
Ta voix est la cloche qui tinte
Pour l'Angelus des voluptés,
Doiit l'ariette en demi-teinte
Prédit des bonheurs convoités
Les Heures saintes.
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOU JE-DIODET, éditeur, 3q,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LES MA IX S DE L'AMANTE
Moderato
3 dulr-n
-V tr-
iant, mef-s ta raain jo - lie, Ta main, fleur cal
m«nte aux pé.ta.les blancs, Dont le frù. le
a ^ ■ Il y
i/ *^ / p '^ Ir l' *"
leup, sœur de la fo - lie, Qui ré-pand en
vall.
moi ses feux vi . ra _ lents
8o Chansons vécues
Sur mon front brûlant, mets ta main jolie,
Ta main, fleur calmante aux pétales blancs,
Dont le frôlement gracieux pallie
L'intime Douleur, sœur de la Folie,
Qui répand en moi ses feux virulents.
C'est que mon amour est à l'apogée
De son glorieux et divin chemin,
Et que ma pauvre âme est tout affligée
De "voir désormais sa foi partagée
En regret dhier et peur de demain.
Mais tu vas chasser ces frivoles craintes
D'un geste à la fois noble et consolant;
Tu vas me placer hors de leurs atteintes,
En joignant tes mains, ainsi que les saintes.
Pour les imposer sur mon front brûlant 1
Les Mains de l'Amante 8i
Car, lorsque tes mains sur mon front placées.
Font le geste pur et doux de bénir.
Seul, l'heureux présent vit en mes pensées :
Je n'ai plus regret des Heures passées,
Et je n'ai plus peur du temps h, venir !
Publiée avec lautorisation de M. DIGO UDE-DIODET. tidiccur.
faubourg Saint-Martin, Paris.
LE SOMMEIL DE L AMANTE
Rè-gtR- lex.ijui.bf fan.t
84 Chaiisons vécues
Ferme tes yeux, voici les songes,
Escortés de tous les mensonges,
Qui viennent quérir tes esprits
Pour les entraîner au pays
Où, par les caprices, choisie,
Règne l'exquise Fantaisie.
Clos tes lèvres à mes caresses;
Voici les heures charmeresses
Où le pacifiant repos
Vient, sur les gracieux propos
Que ta chère voix balbutie.
Verser le philtre d'inertie.
Le Sommeil de l'Amante
Ferme ton cœur, ô mon aimée.
Voici la divine accalmée,
Le cœur a besoin de sommeil !
Demain, au lever du soleil,
A notre amour, qui s'en exile.
Tu le donneras pour asile.
Publiée avec laurorisation do M. DIGOCDE-DIODET, éditeur. 3<
faubourg Saint-Martin, Paris.
SEREXADE A L'AMANTE
Andandno
.3 dolce
bruit, Le vol des pensers fii - ne. br
88 Chansons vécues
La terre a pris à la nuit
Son grand manteau de ténèbres.
Et voici passer sans bruit
Le vol des pensers funèbres.
Mon âme a pris à la nuit
Sa tristesse indéfinie,
Cependant que me poursuit
La redoutable insomnie.
Mais, pour rejeter au loin.
Le fantôme qui la hante,
Devant ton cœur, seul ténioin,
Voici que mon âme chante !
Sérénade à l'Amante 89
Elle chante la douceur
Des minutes écoulées,
Et l'enchantement berceur
Des chimères envolées.
Elle chante la grandeur
De nos volontés unies,
Et célèbre la splendeur
De leurs pures harmonies.
Elle annonce un nouveau jour
Plus munificent encore,
Et prédit à notre amour
Une impérissable aurore !
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 39.
faubourg Saint-^Martin, Paris.
A ma chère amie el interprèle Francine Lorée,
en affectuenx souvenir.
CHANSONS
POUR LA NOUVELLE AMANTE
LA NOUVELLE AMANTE
M* de Mazurka
- l^'', j® j'-^ - **' *3 CL'ncire,Pauvre amour dé
ant qui te veut ne . prendre, 0 toi, qui mou
94
Ch
lansons vécues
. rus de ne pas com. prendre Le rêve i- dé
al qUe j'a-vais cueil . li Aux monts ou ïi
rail. % 5 .
Leaa rè_gne sur le ten . dre
LcL nouvelle Am.inie 95
Au vent de l'oubli je jette ta cendre.
Pauvre amour défunt en mon cœur vieilli
Retourne au Néant qui te veut reprendre,
O toi qui mourus de ne pas comprendre
Le rêve idéal que j'avais cueilli
Aux monts où le beau rèstne sur le tendre.
Que la douce paix veille sur tes restes,
Passé qui ne vis qu'en mon souvenir.
Du suprême adieu je te fais les gestes,
Je brise à jamais tes chaînes funestes.
Et j'attends, les yeux sur mon avenir,
Qu'un soleil nouveau luise aux lieux célestes.
96 Chansons vécues
Mais, poar éblouir l'été de ma vie,
Voici qu'apparaît l'astre souhaité,
Sous ses rayons d'or, le Songe et l'Envie
Germent en mon âme émue et ravie,
Et je sens déjà qu'à sa volonté,
Ma volonté propre est presque asservie.
O Femme, en qui grâce, ardeur et tendresse,
Sont sœurs de l'altière et blonde beauté,
Pose sur mon cœur tes pieds de déesse,
Règne sur ma vie en seule maîtresse,
Et par ton amour et par ta bonté,
Redonne à mon âme une autre Jeunesse !
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur de
musique, 3q, faubourg Saint-Martin, Paris.
LE REFUGE
Mod»-^
- teint, Quand, mal-j^ré la doiLceur do
mauvais sou-vt^.nirs as . saiLlent ma ppn
98
Chansons vécues
bras sont le re. fuge ou ma pei. ne s'é -
Le Refuge 99
Tes bras sont le refuge où ma peine s'éteint;
Quand, malgré la douceur de l'ère commencée.
Les mauvais souvenirs assaillent ma pensée
Pour l'entraîner aux lieux où la douleur l'atteint.
Tes bras sont le refuge où ma peine s'éteint.
Tes bras sont le refuge où la volupté dort,
La sainte Volupté, mère de toute joie;
Laisse-moi l'éveiller pour qu'elle se déploie,
Comme un aigle d'amour dont la caresse mord;
Tes bras sont le refuge où la volupté dort.
Tes bras sont le reruge où vogue mon désir,
Le port délicieux où vient s'ancrer mon rêve.
Un sable de bonté diamante la grève
De cet asile aimé que ma main sut choisir :
Tes bras sont le refuge où vogue mon désir.
100 Chansons vécues
Tes bras sont le refuge où je voudrais mourir,
Bercé par rh3^mne fou des divines chimères,
Loin des réalités sottement éphémères,
Et tout près de ton cœur que mon cœur sut ouvrir»
Tes bras sont le refuge où je voudrais mourir!
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur de
musique, 39, faubourg Saiut-Martin, Paris.
PROMENADE EN MER
Moderato
1 ^
dolce
caJrae et ia brise est douce, Sieds-toi près de
moi, sur i'es.cjuif ié . gtr, Que le bonJie
te pro . te . g^
6.
102 Chansons vécues
L'océan est calme et la brise est douce;
Sieds-toi près de moi sur l'esquif léger
Que le bonheur guide et que l'amour pousse
Pour te protéger.
Je veux que tu sois émue et charmée
Par l'hymne éternel que disent les flots;
Car ton âme est noble et n'est point fermée
A tous leurs san2:lots.
Goûte à mes côtés l'ivresse de l'heure
Où, toujours sublime en sa majesté,
L'âme de la mer chante, gronde et pleure
Dans l'immensité.
i
Promenade en Mer 103
Écoute : on dirait des voix caressantes
D'amantes clamant, en un divin chœur,
Le charme ingénu des amours naissantes
En un jeune cœur.
Écoute : on dirait des voix violentes
D'amantes hurlant, en un fou transport,
L'horrible beauté des amours sanglantes
Dont se rit la Mort.
Écoute : on dirait des voix résignées
D'amantes pleurant, en leurs oraisons.
Défuntes amours, douleurs dédaignées,
Viles trahisons.
C'est l'amour, vois-tu, qu'en sa liturgie
L'Océan exalte éternellement,
L'amour dont la blanche ou noire magie
Rend sage ou dément.
104 Chansons vécues
L'amour, notre maître, ô ma douce reine,
L'Amour-dieu par qui tout est enfanté,
UAmour, qui régit le monde et le mène
A l'Eternité !
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur de
musique, 3q. faubourg Saint-Martin, Paris.
A BSENCE
And"
do le.
raour a.vait fait son nid, Mes yeux ont pJeu
>. I I
âme à mon cœur fer . raée, Ma mie a quit
io6
Ch
ansons vécues
té Tî le par.fu . mée., Ou toute es. pé
•ance est dé- jà fu - mée, Outout jo-Ji
rail. . ■% 1
-^ lit — ' — —r
songe est presque fi . ni!
Absence 107
Ma mie a quitté l'Ile parfumée,
Où l'oisel d'amour avait fait son nid.
Mes yeux ont pleuré l'exil de l'aimée,
Car j'ai cru son âmie à mon cœur fermée.
Ma mie a quitté Tlle parfumée
Où toute espérance est déjà fumée.
Où tout joli songe est presque fini !
Ma mie a laissé dans l'Ile enchantée
De son souvenir les troublants parfums.
La phrase d'amour, qu'elle m'a chantée,
Est en mon esprit saintement restée.
Ma mie a laissé dans l'Ile enchantée
Des mots pour fleurir m'a muse attristée.
Des mots pour prier sur les jours défunts,
loS Ch
ansons vécues
Depuis ton départ, Tlle est désolée :
Y reviendras-tu chasser la douleur ?
La joie avec toi s'est vite envolée :
La voix de la Mer est triste et voilée.
Depuis ton départ, l'Ile est désolée :
Y reviendras-tu, ma douce exilée,
Terrasser l'ennui, héraut du malheur?
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur de
musique, 39, faubourg Saint-Martin, Paris.
ENNUI
Mùà^?
- ment pè.se sur mon àme, L'ennui, ce bour-
reau des cœurs an_gois - ses, L'ennui, ce ty
U. ^H ^ N— Jv
cube au bai-ser in . fume, Qui met un lin
'-a/l. ^ , S
- ceul aux corps ha.ras _ ses.
iio • Ch
lansons vécues
L'ennui lourdement pèse sur mon âme.
L'ennui, ce bourreau des cœurs angoissés,
L'ennui, ce t3'ran des cerveaux lassés.
L'ennui, ce sucube au baiser infâme,
Qui met un linceul aux corps harassés.
L'ennui rend mortelle et sinistre l'heure.
Par lui, tout effort est stérile et vain ;
Toute volonté se glace en chemin ;
Tout désir est nul, tout espoir est leurre,
Et tout souvenir se change en chagrin.
L'ennui lourdement pesant sur mon être,
Inonde mon cœur, qu'il broie et dissout,
Du breuvage amer de l'impur dégoût;
Puis, tel un hibou que la nuit fait naître.
Crie en mon esprit le néant de tout.
Ennui III
Pour le terrasser avec ses tortures,
Il me faut tes yeux, tes mains et ta voix,
Les baumes divins que versent tes doigts
Cicatriseront toutes mes blessures :
Reviens me guérir encore une fois I
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDÉ-DIODET, éditeur de
lusiquc, 3(j, faubourg Saint-^Iartin, Paris.
A TTENTE
Moderato dohe et léqev
yer, par vos cris près, sants, Cel.le dont Ja
grâce a mis en de . route iMon cœur, nia rai.
-t; i^ ■ " -ir-T-
son, mes es-prits, mes sens.
114 Chansoîis vécues
Allons, mes pensers, mettez-vous en route,
Pour apitoyer, par vos cris pressants,
Celle dont la grâce a mis en déroute
Mon cœur, ma raison, mes esprits, mes sens.
Allons, mes désirs, prenez l'envolée,
Pour faire cortège, en son long chemin,
A celle vers qui mon âme est allée
Servir de jouet à sa frêle main.
Allons, mes douceurs, allons, mes caresses,
Allons, mes soupirs, prenez votre essor,
Vers celle qui vient, portant des promesses
D'heureux jours tissus de tendresse et d'or.
Attente 115
Allons, mon amoar, vers ta Souveraine,
Vogue à pleine voile, en page soumis.
Mon cœur est un ciel dont elle est la reine :
Offre lui les clefs de ce paradis !
Publiée avec lautoris3*lon de M. DIGOUDE-DIODET. éditeur de
musique, 3q, faubourg Saint-Martin,' Paris.
RETOUR
SOM't hnlfiii
-j^
—
— fr-
N 1
i?^ 1 i i
=t=
-^* 1
H"'
ii.>s in . lii)
ii8
Ch
lansons vécues
.
K
K.
K
-/Wy w J J J J- f— ' 1^
-\J^ « « * * * b ^^^7
J
G
lentes,
A .
yant
r<-
- CoU .
vrp
V
l.ur
JL r* -y w w B W-' iM
^
-A
— ^
^ —
-4-
=-^
=^=
' 1
Jantes Douces comme ta dou-ceur!
Retour 119
Pour saluer ta venue
Et célébrer ton retour,
La mer, qui t'a reconnue,
Se transforme en lac damour.
Les sirènes indolentes,
Ayant recouvré leur sœur,
Ont des voix ensorcelantes,
Douces comme ta douceur !
Pour fêter ton arrivée
Et ranimer tes pieds las,
Les fleurs, qui t'ont retrouvée.
S'ornent de leurs falbalas ;
Leurs parfums ont des caresses
Chaudes comme un vent d'été,
Et la terre a des tendresses.
Bonnes comme ta bonté I
20 Chansons vécues
Afin de te rendre hommage
Et de réjouir ton cœur,
Les oiseaux sur ton passage
Vont organiser un chœur;
Tout par toi se renouvelle,
Tout redevient volupté,
Par toi la nature est belle,
Belle comme ta beauté !
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDÉ-DIODET, éditeur de
lusique, 3q. faubourg Saint-Martin, Paris.
TEMPETE
Ancl*.«
2 %
Maesloso
té sifl le,hiirJe,pJi-'U . re, SeiiJe à dtj.cfai
gnor ce, dé.c'haî.ne. ment, L;i masse dt
122
Chansons vécues
1er Je flot qui i t-f - fleu
Tempête
La mer en fureur gronde sourdement ;
Le vent irrité siffle, hurle, pleure!
Seule à dédaigner ce déchaînement,
La masse des rocs, impassiblement,
Résiste au courroux de chaque élément
Et fait reculer le flot qui l'effleure.
Le jour se revêt des langueurs du soir,
L'horizon se meurt au fond des ténèbres,
Et du ciel voilé d'un suaire noir,
Des trombes d'horreur et de désespoir,
Dans un tourbillon, sur la mer vont choir
Et se déchirer en sanglots funèbres.
124 Chansons vécues
Ce spectacle est grand, imposant et beau !
Mais t'attriste-t-il, ô ma bien-aimée,
Ce majestueux et sombre tableau,
Que, silencieuse en face de l'eau.
Tu semblés rêver au bord d'un tombeau
Et pleurer une âme à l'amour fermée ?
Tu songes qu'un jour la voix des Autans
Troublera nos cœurs et nos destinées,
(La vie et le cœur ont leurs ouragans...)
Et que les malheurs viendront en tyrans,
(La vie et le cœur ont flux et jusants...)
Heurter de leurs flots nos belles années.
Mignonne, oublions, au sein du plaisir,
Qu'un jour les chagrins fondront sur nos têtes.
Le présent est doux, sachons en jouir.
Voyons sans efl"roi poindre l'avenir :
Nos cœurs, que l'amour a pu réunir,
Sauront défier toutes les tempêtes !
Publiée avec lautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur de
musique, 3q, faubourg Saint-Martin, Paris.
COUCHER DE SOLEIL
Lafsro dolce
La joie é.pand en
26
Chansons vécues
En \c. cieleraJaru- - rcour
Coucher de Soleil ii'
Les vents se sont calmés, la mer s'est apaisée,
Le silence a repris son règne interrompu.
La joie épand en nous la paix de sa rosée.
Et le deuil de la terre est par ses soins rompu.
En le ciel embrumé paraît une éclaircie
D'où le soleil surgit, rouge et resplendissant.
Couronné comme un roi, nimbé comme un messie
Dune auréole d'or, de lumière et de sang.
Les flots sont caressés par ses rayons de gloire.
Leur cime a les reflets des plus purs diamants.
Les rocs ont rejeté leur carapace noire.
Pour semer des rubis sur leurs escarpements.
128 Ch
lansons vécues
C'est l'ultime lueur d'une lente agonie,
C'est le suprême éclat d'un astre qui s'éteint,
C'est le dernier éclair d'un somptueux génie,
C'est l'angoisse d'un Dieu que le trépas atteint !
Assiste, ô mon amie, à cette fin sublime.
En songeant qu'ici-bas tous les efforts sont vains,
due toute route mène aux portes d'un abîme,
Et que la Mort attend tous les soleils humains.
La gloire et la beauté sont des astres qui meurent,
La fortune et Torgueil sont des soleils d'un jour.
Seuls, de par le Destin, les astres qui demeurent
Sont les chers souvenirs d'un périssable amour !
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éiitour d:
musique, 3q, faubourg Saint-Martin, Paris.
ACCALMIE
0,.^'"^'-%
%
dnl<-
#Lî^ ■ 11^ -^r^zi^
Fer. me Jen . tt
înt tes ^-eux do per - venche, Voi.ci le soi
- chés au val des d<'u . ceurs, Fr;inchis le
gique o.cé.an des Dues, Yaverslir-rt
no
Chansons vécues
Accalmie 131
Ferme lentement tes yeux de pervenche.
Voici le sommeil et sa moisson blanche
De songes fauchés au val des Douceurs.
Franchis le magique Océan des nues,
Va vers l'irréel où sont inconnues
Douleurs, trahisons, lâchetés, noirceurs.
Suis le vol léger des chimères blondes :
Il te guidera vers de nouveaux mondes
Où règne un splendide et chaud floréal ;
Il t'entraînera vers l'unique grève
Où tu fouleras les algues du rêve,
Où tu fleuriras ton cœur d'idéal.
132 Chansons vécues
Oubliant la vie avec ses discordes,
Rythme ta pensée aux soupirs des cordes
Que font tressaillir les illusions !
Va vers la Beauté, va vers l'Harmonie,
Va vers le Mystère en qui le Génie
Puise la splendeur de ses visions.
Tes yeux sont fermés, voici l'accalmie.
Je veux te bercer, ma douce endormie,
En te murmurant de très vieux refrains;
Car, en le parfum des choses anciennes,
Nous trouvons Toubli de nos vieilles peines
Et nous pressentons nos bonheurs prochains î
Publiée avec, l" autorisation de M. DIGOUDE-DIODET. éditeur de
lusique, 39, faubourg Saint-Martin, Paris.
CHANSONS PROFANES
CHANSON SUR UN VIEIL AIR
A Madame Valéry Hermay en affectueux
hommage.
AiJ . très gaxment
tous lieux OD pro- fes - se, Digue don ma don
don, Que le vo . yage est bon, Digu(
- tu Lijson? Diguo don ma don . don .
136 Chansons vécues
Pour former 1* jeunesse,
Digue don ma dondaine,
En tous lieux on professe,
Digue don ma dondon,
Que le voyage est bon,
Digue don ma dondaine :
Qu'en penses-tu Lison?
Disque don ma dondon.
— Le plus utile à faire,
Landeri derirette,
Est celui de Cythère,
Landeri derira :
C'est là que les garçons,
Landeri derirette,
Trouvent sages leçons,
Landeri derira.
Chanson sur lin vieil air i^j
— De celles qu'on y puise,
Digue don ma dondaine,
Laquelle, gente Lise,
Digue don ma dondon,
Est douce à pratiquer,
Digue don ma dondaine,
Veux-tu me l'indiquer ?
Dio;ue don ma dondon.
— Elle apprend à connaître,
Landeri derirette,
L'endroit par où pénètre,
Landeri derira,
Pour y faire séjour,
Landeri derirette,
Chez les filles, l'amour,
Landeri derira.
— N'est-ce pas vers l'oreille,
Digue don ma dondaine.
Que l'amour appareille,
Digue don ma dondon.
138 Chansons vécues
0\i n'entre-t-il pas mieux,
Digue don ma dondaine,
Par la route des yeux,
Digue don ma dondon ?
— C'est par une venelle,
Landeri derirette,
Que la nature cèle,
Landeri derira,
Au regard indiscret,
Landeri derirette.
Par un mur de duvet,
Landeri derira.
— Pour y faire une brèche,
Digue don ma dondaine.
Si tu connais la flèche,
Digue don ma dondon,
Dont se sert Cupidon,
Digue don ma dondaine,
Apprends-le-moi, Lison,
Digue don ma dondon
Chanson sur un vieil air 73 9
— Cupidon choisit celle,
Landeri derirette,
du'il tient pour la plus belle,
Landeri derira,
Du carquois enchanté :
Landeri derirette,
La flèche Volupté,
Landeri deriré !
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 3q,
faubourg Saint-Martin, Paris.
PAYS DE COCAGNE
A mon ami Valéry Hermay
en afecineiix hommage.
Moderato
3 d'>l(r fjrazioi
meiif,\ i»^ns t'tn ;iu cfuirmant P.i.ys de Co . c.i . gnt
142
Ch
ansons vécues
Si tu veux, Lison,
Laisse ta raison
Battre la campagne,
Et, diligemment,
Viens-t'en au charmant
Pa3^s de Cocagne.
Pour y parvenir
La voie à choisir
Parmi les plus brèves,
Est sans contredit,
A ce que l'on dit,
La route des Rêves.
Pays de Cocagne 143
Cette route là,
Belle, suivons-là
Marchant côte à côte,
Il vaut certes mieux,
En gravir à deux
L'agréable côte.
Et quand nous serons
Très haut, nous prendrons
Pour char, ta couchette,
Où s'attellera
Eros qui saura
Nous conduire au faîte.
En ce beau pays,
Des oiseaux exquis
Vont à tire d'aile.
Ce sont tous les ris
Par Cupidon pris
Aux lèvres des belles.
144 C'/î
ansons vécues
Et le ver luisant
Que, chemin faisant,
On trouve dans l'herbe,
Sous des cils caché,
Guettant le péché,
Est un œil superbe.
Le fruit qu'on y voit
Mûrit sous le doigt
Qui Feffleure à peine,
D'un sein rose et blanc
C'est le pic tremblant
Sous la tiède haleine.
Et plus loin, plus loin,
Dans un petit coin
Où l'ombre est très douce,
Au versant du mont,
Est un puits profond
Entouré de mousse.
Pays de Cocagne 145
Puits mystérieux,
D'où toujours pour ceux
Qu'Eros accompagne,
Sort la Volupté,
Seule vérité
Régnant en Cocagne î
Publiée avec l'autorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 3),,
faubourg Saint-Martin, Paris.
UETENDARD
A mon ami Pierre Trimouillat^
afe^lueusement.
AHegro
_3 gaîment '
pris l'enga-ge . ment De ser.vir dans le ré.gi
ment Qu'Eros a pour ro.ya . le gar - de,
Sur mon re.nom de grand pa^il.lard.Je fus nom.
i . li - ce pail - 1
148 Chansons vécues
Lorsque je pris l'engagement
De servir dans le régiment
Qu'Eros a pour royale garde.
Sur mon renom de grand paillard,
Je fus nommé porte étendard
De cette milice paillarde.
Lors, en bon courtisan du roi
Dont j'acceptais toute la loi,
Je voulus à ce chef suprême
Offrir le mystique trésor
D'un étendard aux franges d'or,
En entier construit par moi-même.
U Étendard 149
Et la hampe de mon drapeau
Fut le bras, royalement beau,
Que je pris au corps de ma belle,
Qui me donna de ses cheveux
Les longs fils dorés et soyeux
Pour en tisser la brocatelle.
Ce fut du carmin de son teint
Que sur l'étoffe d'or fut peint
Le mot (f Volupté » pour devise;
Et ce fut par un doux larcin
Que j'obtins le pic de son sein
Comme emblème de paillardise.
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 3q.
faubourg Saint-Martin, Paris.
CHANSOX DES FOSSETTES
A mon ami Ernest Jetot,
affectueusement.
=7^
S
Irèa çjai fl Iv
fs h'qrr
AlP
#=
1-=
— u — 1
hé: les ri.res en.di8bles, les ri.res savamment pep.
nés en notes exqui. ses, Quels sont les abris ,fa.vo.
152 Chansons vécues
riç, Où se groupe vo.tre trou . pe?_
No - tre pe - le . ton,
1-. r, , ^ j
h, r r ( h ^
Hl
4^'- v} 1 '
L-^,^ li Ji J '_U
^ 1
fossettes,Qubnt filles coquettes,Autour du menton.
Chansons des Fossettes 153
Ohé ! les rires endiablés,
Les rires savamment perlés
Comme d'habiles vocaUsesI
Ohé ! les rires raffinés,
Délicatement égrenés
En notes exquises!
duels sont les abris,
Favoris,
Où se groupe
Votre troupe ?
— Notre peloton
Se loge aux fossettes
Qu'ont filles coquettes
Autour du menton.
154 Cha7isons vécues
Ohé ! tous les baisers brûlants,
Plus sonores et violents
Que des chocs bruyants de cymbales !
Ohé ! les baisers, fils des dents,
Tourmenteurs de chairs et mordants
Comme des ratales !
Quels sont les abris.
Favoris,
Où se groupe
Votre troupe ?
— Nous nous abritons
Au creux des fossettes
Qu'ont filles coquettes
Entre les tétons.
Ohé ! les amours sensuels,
Frères des Cupidons charnels
Et des impudiques caresses !
Ohé ! les amours enfantés
Par les déesses Voluptés
Au ciel des Ivresses,
Chanson des Fossettes 155
Quels sont les abris,
Favoris,
Où se groupe
Votre troupe ?
— Ohé ! nous campons
Aux creux des fossettes
Qu'ont filles coquettes
Sous les fins jupons.
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDÉ-DIODET, éditeur, Sg,
faubourg Saint-Martin, Paris.
PETITE GUERRE
A mon aviie Jeanne Lovée
en affectueux souvenir.
Au corps fluf-t de da_m€
Ccp _ tain jour je li.vrai b;
is8 Ch
lansons vécues
1 . J(
raiJ - Je
De lar. se.Dal des doux pé
rail. o
chés.Où Jes traits d'Eros sont cachés .
Petite Guerre 159
Au corps fluet de dame Lise,
Qui, par sa grâce, symbolise,
En tous ses replis et contours,
La citadelle des amours,
Certain jour je livrai bataille,
Pour battre en brèche la muraille
De l'arsenal des doux péchés
Où les traits d'Éros sont cachés.
Mais Lise, voulant se défendre,
Par ruse, imagina de prendre
Son lit comme retranchement;
Pour le forcer habilement
Et faire mettre bas les armes
A la légion de ses charmes,
Je lançai des baisers nombreux
Dans le bois blond de ses cheveux,
i6o Chajîsons vécues
Lors, galopant à toute allure,
Ils prirent d'assaut sa figure.
Sa gorge, son ventre ivoirin,
Pour s'arrêter près du chemin
Aboutissant à la tranchée
Mystérieusement cachée,
Où, dans un redan isolé,-
Le trésor de guerre est celé.
Ce fut alors que j'eus la gloire
De remporter double victoire;
Car, ne pouvant plus soutenir
Le feu cruel de mon désir,
' A ma merci se mit la belle
Qui me rendit la citadelle,
Où je trouvai double trésor :
Le plaisir sous la toison d'or.
Publiée avec Tautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, cditeui
faubourg Saint-Martin, Paris.
MON MUSEE
A mon ami Charles Giiilhaiimcn
affectueusement.
% 2 Moderato simplement
Et n'ayant,poup foJJe maî. tres.se, Que la tou.-
jours jeune chanson, Ma chambre étroite, pa.voi
l62
Ch
ansons vécues
sée De toutes mes an-ti_qui-tés
Mon Musée 16}
Quand je serai le vieux garçon
Sacrifiant à la sagesse
Et n'ayant pour folle maîtresse
Que la toujours jeune Chanson.
Ma chambre étroite, pavoisée
De vieux objets étiquetés,
Sera le précieux musée
De toutes mes antiquités.
Classés par rang d'ancienneté,
Ils en seront les hiéroglyphes,
Les doux mots tracés par les griffes
D'une antique divinité.
Et le moins lisible autographe,
Très pieusement conservé.
Aura, de par son orthographe,
Droit au coin le plus réservé.
164 Chansons vécues
Dans mon bizarre logement ,
Fleurs offertes par les amies,
Vous serez les sèches momies
Qui dorment éternellement ;
Je construirai pour vos squelettes
Sarcophages en maroquin,
Et vous ferai àts bandelettes
Avec les pages d'un bouquin.
Quand j'aurai chanté l'air final
Du grand opéra des folies,
J'aurai d'étranges panoplies
Dans mon musée original :
O vieilles armes exposées,
Dont seront ornés mes murs nus,
Vous serez les flèches brisées
De tous les Cupidons vaincus !
Publiée avec rautorisation de M. DIGOUDE-DIODET, éditeur, 39,
faubourg Saint-Martin, Paris.
LA FLORE D'AMOUR
LILAS
A ma chère amie et interprète^ Francine Lorée,
en affectueux souvenir.
2 Léger et a$^ez vif\
las pour les berceaux frêJes Des amours nais _
terups, che.va-lier aux f leurs, J'apporte aux li
las de ueu-ves cou . leurs, J'apporte aux
rail. ^
mours do nou,vel - les ai . 1
i68 Ch
lansons vécues
Q.ai veut des lilas pour les berceaux frêles
Des amours naissant aux primes chaleurs?
Je suis le Printemps, chevalier aux fleurs :
J'apporte aux lilas de neuves couleurs,
J'apporte aux amours de nouvelles ailes.
Qui veut des lilas pour les nids fragiles
Des amours chantant loin des oiseleurs?
Je suis le Printemps, chevalier aux fleurs :
J'ai pour les lilas de neuves odeurs,
J'ai pour les amours de nouveaux asiles.
Qui veut des lilas ? La fosse est creusée
Pour l'amour tombant aux primes douleurs I
Je suis le Printemps, chevalier aux pleurs :
Je donne aux amours des linceuls de fleurs,
Je donne aux lilas des pleurs pour rosée !
Publiée avec lautorisation de G. RICORDI et C'^ éditeurs, 62,
boulevard Malesherbes, Paris.
ROSES
A ma chère amie et interprète, Fèlicia Malîet
en affectueux souvenir.
iModerato
voix a fait ins? .pi . rè
170
Ch
ansons vécues
it^^^
V ^ r
s,
1 J Ï ^' ^ '"=?=]
^=
L_
-J ^ — d — 0 J-^
i!» Et la-mour m'a x dit Pa-re la dt
roses, Les femmes, Jes fleurs, pour de dou.ce;
rail
K
;auses, Par.fuœent la v
I
Roses 171
J'ai dit à Tamotir :
f< Je veux des fleurs pour
Parer Fadorée,
Celle dont la voix a fait inspirée
Ma vie î »
Et Tamour m'a dit : « Fare-Ia de roses :
Les femmes, les fleurs, pour de douces causes,
Parfument la vie. »
J'ai dit à l'amour :
« Je veux des fleurs pour
Griser l'adorée,
Celle dont le geste a fait éthérée
Ma vie! »
Et l'amour m'a dit : « Grise -la de roses :
Les femmes, les fleurs, pour d'ardentes causes,
Enivrent la vie î »
172 Chansons vécues
J'ai dit à l'amour :
« Je veux des fleurs pour
Tuer l'adorée,
Dont le long silence a fait éplorée
Ma vie ! »
Et l'amour m'a dit : « Tue-la sous des roses :
Les femmes, les fleurs, pour d'obscures causes,
Désolent la vie ! »
Publiée avec lautorisation de G. RICORDI et C'e, éditeurs, 62,
boulevard Malesherbes. Paris.
VIOLETTES
A mi chïre amie et interprète, Chris t'iane Mendeïy:
en affecfiieifx souvenir.
Mod^° sans lenleiii
- Dis par le clair prinJemps, L«3 vi.o_let-teg
nais_sent, Mais les doigts cru.els des amants cons-
tants, Hé-Iasfne les V laissent Flenrir et fleu.
rali.
r^r que de coarts ins- tants!
174 Chansons vécues
Aux bois rajeunis par le clair printemps,
Les violettes naissent;
Mais les doigts cruels des amants constants,
Hélas ! ne les y laissent
Fleurir et fleurer que de courts instants !
Aux nids merveilleux par des seins formés,
Les violettes meurent;
Car les doigts jaloux des êtres aimés,
Doucement les effleurent :
Calices défunts, vous voici fermés !
Entre les feuillets des livres jaunis,
Les violettes dorment ;
Sous les doigts pieux des amants unis,
Les mortes se transforment
En symboles chers des bonheurs finis !
Publiée avec l'autorisation de G. RICORDI et C'", éditeurs, 62,
boulevard Malesherbes, Paris.
MARGUERITES
A ma chère amie et interprète^ Violette Dechaitme
en affectueux souvenir.
Andanfino
fjeiij's, maîtresse, à ton ré . vcii,
Pour que (j 'S Je ma. tin, ton â.mesoitjoy.
Jl =^
1, r . i. . ) \
Y '— -' ^ J
'^ ' r r : ^
Prends en tes che.
Et paj-e tes cheveux de leur beauté so^_ eu - se
176 Chansons vécues
Je t'apporte des fleurs, maîtresse, à ton réveil.
Pour que dès le madii ton âme soit joyeuse.
Prends en tes chères mains ces filles du soleil,
Et pare tes cheveux de leur beauté soyeuse.
Ce sont de douces fleurs, leurs pétales sont blancs,
Leurs parfums sont discrets, leurs âmes sont parlante
Les amants inquiets les cueillent, tout tremblants,
Afin d'en obtenir des phrases consolantes.
Quand tombera le soir, tu les effeuilleras
Pour déchiffrer le sens de leur divin poème.
Hymne de passion, dans lequel tu liras
Avec quelle ferveur et quelle ardeur je t'aime I
Marguerites 177
Puis tu te livreras aux baisers du sommeil,
Certaine qu'en ton cœur mon cœur soumis s'abrite,
Et tu répéteras, demain à ton éveil,
Tout l'alphabet d'amour qu'apprend la marguerite !
Publiée avec l'autorisation de G. RICORDI et C'*, éditeurs, 62,
boulevard Maleshcrbes, Paris.
MYOSOTIS
A via chère amie et interprète, Henriette Lud:fy,
en affectueux souvenir.
Rap-pei-ient à notre ou-Jbli. eu . se
rail.
Les pro_ines_se6 des jours pas.sés.
i8o Chansons vécues
Petite fleur délicieuse,
Sur ta corolle gracieuse
Des mots mystérieux tracés
Rappellent à notre oublieuse
Les promesses des jours passés.
Et si notre idylle s'achève,
Dans ta langue exquise de rêve
Tu murmures : « N'oubliez pas î »
A l'ingrate qui nous enlève
L'étreinte douce de ses bras.
Et si sur l'aile du mensonge
S'envole notre plus cher songe,
Tu dis après nous : « Aimez -moi ! »
A celle dont le dédain plonge
Notre âme en un fébrile émoi.
Myosotis i8r
Petite fleur mystérieuse,
Q.ue ta corolle précieuse
Porte cet adage formel
Qu'épellera notre oublieuse :
« Serment d'amour est éternel I »
Publiée avec lautorisation de G. RICORDI et C'", éditeurs, 62,
boulevard Malesherbes, Paris.
PENSÉES
A ma chère amie et interprète, Germaine Diris,
en affectueux souvenir.
Moderato
" ■ " V^^^ ■ V r
En Jo vieux ro.
(juaipe ou gi.sent mes se - cret^.Dort Je missel d a .
mour que nous Jù.mes en . sem . • bJe,
Len-te.meDt,au-jour-d'bui, j'en tourne les feuiJ.
i84
CJia
nsons vécues
k-ts, Du-De fi-eu-se main qui se crispe et qui
' i> V [> — —
eux d^ dûU-lou_reux re - ffrets L
Pensées 185
In le vieux reliquaire où gisent mes secrets,
3ort le missel d'amour que nous lûmes ensemble;
^entement aujourd'hui, j'en tourne les feuillets,
D'une pieuse main qui se crispe et qui tremble
D'éveiller avec eux de douloureux regrets.
Homme dans un linceul tissu de souvenirs,
['avais enseveli deux fleurs entre ses pages,
[e retrouve ces fleurs ; et voici rajeunir
Mon cœur et mon esprit que ne purent ternir
Les pleurs des anciens jours, les deuils des nouveaux âges,
Et ces fleurs dont me fit ofî'rande votre main
/\ux heures d'abandon, sont de simples pensées,
Dans lesquelles je lis tout le mystère humain :
Mlégresse d'hier, tristesse de demain.
Douceur et cruauté de nos amours passées I
Publiée avec l'autorisation de G. RICORDI et C''-*, éditeurs, 62
boulevard Malcshcrbes, Paris.
^
CHANSONS VARIÉES
CHANSO.X DU CRÉPUSCULE
En hommage à Madame Laurent Taiihade.
Andantino
3
très doui__
7-^'. - 1
■pr
— ^— ■' V ■ ■■ N"
=^
1J'' '' '
-•-
— * i
Le so-Jeil
Dont le cré-pus - eu
le, en tombant, nous gri
rall.^ -«^ p ,
se, Comme dun par.
. fum de rêve in.dé - cis.
190 Chansons vécues
Le soleil se meurt, le jour agonise ;
Cédons, mon aimée, au charme imprécis
Dont le crépuscule, en tombant nous grise,
Comme d'un parfum de rêve indécis.
C'est l'heure, à la fois douce et douloureuse,
Où l'esprit retourne aux passés lointains,
Où le cœur se plonge en la mer heureuse
Où sont engloutis les jolis matins.
C'est l'heure où renaît la peine secrète
Qui change en regret l'âpre souvenir.
Où la peur se glisse en l'âme inquiète
Pour y présager l'obscur avenir.
Chanson du Crépuscule 191
C'est l'heure d'aimer jusqu'à la folie
Pour vaincre l'ennui, pour fuir le remords.
L'Amour souverain veut que l'on oublie
Le Passé défunt et ses rêves morts.
C'est l'heure d'aimer jusqu'à la démence
Pour briser l'angoisse et tuer l'effroi,
Le divin Éros veut que le silence
Sur les temps futurs étende sa loi.
Penche ta pensée, ô mon adorée,
Sur le doux missel par mon cœur porté :
Je vais réciter l'oraison sacrée
De l'amant dévot à sa déité.
Laisse-toi bercer par ce lent murmure ;
Voici l'heure exquise où sombre le jour;
Sois en harmonie avec la nature.
Meurs de volupté, de joie et d'amour I
La musique d'accompagnement se trouve chez LAUREXS, éditeui
4, 5, 6, galerie du Théâtre-Français, '
PRIÈRE D'AMOUR
A mon ami Gaston Perducct, affectueusement.
Moderato
r. 2
dolce
Tel un sceptre i.dé . al d'orgueil et de beau
•J'abaisse devant toi rr.a vLri.lo fier . té .
194 Chansons vécues
Mystérieuse fleur dont la tige s'élève,
Tel un sceptre idéal d'orgueil et de beauté,
O femme, lys royal au jardin de mon rêve,
J'abaisse devant toi ma virile fierté...
Aveuglé par les flots de l'exquise lumière,
Q.ui tombe de tes yeux en torrents de clarté,
Je me tiens prosterné le front dans la poussière,
Comme un vassal d'amour devant ta majesté.
Adoucis, pour moi seul, la rigueur de ton geste;
Oppose ta douceur à ma témérité,
Et_, pour moi seul, dérobe à la vigne céleste,
O ma sœur en Éros, le vin de volupté I
Publiée avec l'autorisation de RICORDI et C'*, éditeurs, 62, boule-
vard !Maleshcrbes, Paris. Tous droits de traduction et reproduction
réser\és pour tous pays.
CHANSON DU FIL
A mon ami Laurent Tailhade
affectueusement.
.^.Moderato /,-^'^^,,o„^^„^
Quand de tes fu.seaux He
fi;" - ^^^^ " I ^ -^ V ^-' J
bi . j(
Cou. le, du soir au ma
Fil d»; chanvre ou fil di
U - ne dou .ce mé . K
96
Chansons vécues
«Fil blanc et fil rou-ge, Fil rouge et fil noir,
Tfimple, pa.Jais, bou.ge, Vont vous re.ce.voir.
Chanson du Fil
19'
y V-
Vous se.rez svm.bo-les D'as-ser.vis.se.nienf
D'amour la li-vré.e Fil bJanc tu se.ras;
Pour Jos di-gni-tai.res Aux manteaux pourpres,
La rou-ge li.vré-e De J'orgueil hurâain ,
Fil de couleur noi.re Dont se cou. %ti. root
Chansons vécues
Par sainJe mé. moi_re, Ceux qui pleure.ront
rail.
Leur douleur sa. cré.e D.e.vant un cercueil.
Tu se- ras - livrée De deuil!
Chanson du Fil 199.
Filandière aux doigts agiles,
Quand de tes fuseaux habiles
Coule du soir au matin
Fil de chanvre ou fil de lin,
Une douce mélopée.
De tes lèvres échappée,
Sur un mode puéril,
Chante le destin du fil.
Et je trouve en ta berceuse
Matière à sage leçon :
Redis-moi donc, ô fileuse,
Ta chanson.
— « Fil blanc et fil rouge,
Fil rouge et fil noir,
Temple, palais, bouge.
Vont vous recevoir.
Vous serez symboles
D'asservissement
Aux vaines idoles
D'un vital moment.
200 Ch
lansons vécues
De l'énamourée
Que tu vêtiras,
D'amour la livrée
Fil blanc tu seras;
Pour les dignitaires
Aux manteaux pourprés,
Pour les mercenaires
Et les décorés,
O fil que je crée,
Tu seras demain
La rouge livrée
De l'orgueil humain;
Fil de couleur noire
Dont se couvriront,
Par sainte mémoire,
Ceux qui pleureront
Leur douleur sacrée
Devant un cercueil,
Tu seras livrée
De deuil! »
I.a musique d'accompagnement se trouve chez LAURENS, éditeur,
4, 5. 6, galerie du Théâtre-Français, Paris.
PIERROT INFIDÈLE
A mon ami et inlerprcte Georges JFague,
ajfectiieiisement.
Moder.iîo , . , . ,, ,,
ris et dfs vo- lup - tes , Co.Jorn.bine at
V — y /-
I'' - -V Que l'ingrat
202 Chansons vécues
mant qui l'a dé. so . le. e, Rajnène a_vec
lui le vol des gaî - tés Las! pourquoi Pier-
rot est-il in.fi . de. le? Co.lom bine est
pond. "Co-lombe est je . Ji . e, Et si son Pier.
dra su. re.ment un soir.
Pierrot infidèle 20}
En le nid d'amour que Pierrot déserte,
Et près de la couche autrefois ouverte
A l'essaim des ris et des voluptés,
Colombine attend émue, esseulée,
Que l'ingrat amant qui Ta désolée
Ramène avec lui le vol dés gaîtés.
Las! pourquoi Pierrot est-il infidèle?
Colombine est donc moins douce et moins belle ?
Que dit à cela son petit miroir ?
L'indiscret répond : « Colombe est jolie
Et si son Pierrot n'est pris de folie
Il lui reviendra sûrement un soir. »
Allons, se dit-elle, un peu de courage !
Et sans larmoyer, guettons le volage
Qui s'en est allé devers Tinconnu
Courtiser la blonde, aduler la brune,
Et, qui sait? peut être offrir à la lune
Son mâle désir longtemps contenu.
204 Chansons vécues
Mais soudain, voici qu'une folle idée
Par la ruse et par l'amour fécondée,
Germe audacieuse en son jeune esprit,
Er, fébrilement, presque soulagée
Par l'espoir qu'elle a de se voir vengée,
Tel est le billet galant qu'elle écrit :
c( Mon petit Pierrot, tu m'as délaissée,
« Moi qui t'avais fait roi de ma pensée,
« Et j'ai bien souifert de ton abandon.
« Rien n'éveillera ta tendresse morte,
« Je pars et je laisse au seuil de ta porte
« Mon rêve défunt avec mon pardon. »
Un bruit de pas lourds de l'escalier monte,
C'est lui qui revient ! Colombine est prompte
A rendre apparent l'amoureux billet
Q.u'il faut que l'ingrat trouve, prenne et lise
Et, prête à jouir de son entreprise,
Elle se blottit non loin du buffet.
Mais la porte cède aux fortes poussées
due lui font subir deux mains convulsées.
Pierrot infidèle 205
C'est l'ami Pierrot qui rentre au logis,
Harassé, suant, presque hors d'haleine.
Le blafard amant se soutient à peine :
Las ! le malheureux est tout à fait gris.
Il s'en est allé courir la chimère,
Et boire à longs traits le vin de lumière
Que la lune verse à tous ses galants.
Il est saoul d'amour et de poésie
Et les papillons de sa fantaisie
Montent vers Tanit en nuages blancs.
Lors, il s'aperçoit que la chambre est vide,
Embrasse les murs d'un coup d'œil rapide :
Le nid par l'amie est-il délaissé ?
Il jette un regard furtif sur la table
Et, pris d'un effroi sourd, épouvantable,
Saisit le billet qu'il y voit placé.
Il le lit, ses yeux s'emplissent de larmes,
Et sous le fardeau des neuves alarmes,
Son cœur d'amoureux est comme écrasé.
Colombine alors, quittant sa cachette,
S'approche à pas lents, timide et muette.
Du pâle Pierrot presque dégrisé.
2o6 Chansons vécues
Mais il rit déjà de son infortune,
Et veut à nouveau courtiser la lune
Q_ui dissipera douleur et regret.
La friponne a fui comme Colombine !
Le Ciel porte en bleu le deuil de Lucine ;
La nuit est défunte et le matin naît.
Lors, désespéré d'être sans amante,
Il fond en sanglots, rugit, se lamente
Et résolument appelle la Mort.
Soudain, le soleil franchit la fenêtre,
Jetant la gaîté, versant le bien être
En le loo:is morne où le baiser dort.
Pierrot détournant son visage blême.
Voit à ses côtés la belle qu'il aime
Tendre en souriant ses deux bras vers lui ;
Mais elle lui dit, tandis qu'il s'y plonge :
« L'Amour, mon Pierrot n'est pas un mensonge,
(( Viens, je suis la joie et je vaincs Tennui.
" Tu m'as fuie un soir pour courir la lune, -
« Elle, t'a quitté sans douleur aucune
Pierrot infidèle
« Et je te retrouve au nid déserté.
« Le ciel est trop haut, reste sur la terre;
« La lune, vois-tu, n'est que ta chimère :
« Je suis ton soleil de réalité I »
La musique d'accompagaement se trouve chez LAUREXS, éditeur,
\, 5. 6, galerie du Théâtre-Français, Paris.
PIERROT CHAXTE
A Mademoiselle Fèlicia Malîet
. en affectueux souvenir.
Tranquillo
S- 7
-V y r f <^ {T
hé! la June au blanc mi - nois, C'est ton vieil a.mant
C'est Pierrot qui n a pas en-Cor Chant'- pour
Ta.nit aux yeux d'or, Son chant du cy
210 Chansons vécues
gne, C'est Pier.rot, le joy . eux Pier.rot, Qui
Dar- de sur toi son
gai re-gard,Ri-ant dans son mas-que fcJa.fsrd,
^^ -adlib.
1 , \
-Trr-T ■ i, f — 1" — r —
—i J ? Il
../ ' - V — V V — \^ —
_£ ^ 1 Il
Plein de fa - n . ne!
Pierrot chante 211
Ohé ! la lune au blanc minois,
C'est ton vieil amant d'autrefois
Qui te fait signe,
C'est Pierrot qui n'a pas encor
Chanté pour Tanit aux yeux d'or
Son chant du C3^gne ;
C'est Pierrot, le io3'eux Pierrot,
Qui passant la tête au carreau
De sa cuisine.
Darde sur toi son gai regard,
Riant dans son masque blafard
Plein de farine.
C'est Pierrot, le fripon moqueur,
Voleur, menteur, fou, mais bon cœur,
due tout amuse,
2Î2 Chansons vécues
Qui, de nouveau te tait la cour
Pour que tu veuilles en retour
Être sa muse;
Sois ma muse, fille des nuits,
Déesse superbe qui luis
Au sein du monde,
Sois, ma muse, et que tes rayons
M'apportent dans leurs reflets blonds,
Ta beauté blonde.
Que tu sois la vierge au front blanc
Dont n'a jamais battu le flanc
Sous la caresse,
Et qui traverse le ciel bleu.
Insensible au brûlant aveu
Qu'on lui confesse,
Ou que tu sois, ô ma Tanit,
La courtisane qu'un prurit
D'amour entraîne,
Et qui passe en cherchant des yeux
Quelque beau soleil amoureux
Pour qu'il l'emmène,
Pierrot chante 213
Peu m'importe, ô ma déité,
Pourvu que ta douce clarté
Soit mon égide,
Et, qu'en toi, pour être emporté
Sur les vagues de la gaîté,
Je trouve un guide ;
Car, ô lune, ton vieux minois
Cache dans ses replis narquois
Une harmonie,
Celle des farces et des ris
Où tes yeux d'or font les soli
De lironie !
Publiée avec rautorisation de M. C. JOUBERT, éditeur de musique,
25, rue d'Hautevillc, Paris. Tous droits de traduction, de réproduction
etr d'exécution réserves pour tous pays. Prix du fascicule avec accompa-
gnement de piano 3 francs.
LE DEMENAGEMENT DE PIERROT
A mes amis Marthe et Gaston Dumestre,
en affectueux souvenir.
r
-/k'-'i r
6
-hr^ — «'— f^ — 5 — 1'
(7^ ■? 1
léger et gai
-t — P —
N
Par d i.me For -
/?• ^ ^—"^
t=^
•*
=fF
— E !— * l! ,
J -^ --
/
2i6 Chansons vécues
Par dame Fortune
Qui ne l'aime pas,
Pierrot, mis à bas,
S'en va tirant une
Carriole à bras,
Au clair de la lune.
Quelle grave affaire,
Mon ami Pierrot,
Fait que du sergot
Tu crains l'œil sévère
Fuis-tu donc ton sot
De propriétaire ?
Le Déménagement de Pierrot 21
— Las ! je déménage,
N'ayant plus le sou!
Mais le vieux grigou
N'aura pas en gage,
Sous son lourd verrou,
Mon petit ménage.
Car, sur ma charrette.
J'ai farine, habits.
Guitare, châlits,
Chapeau, collerette,
Billets doux écrits
Par Colombinetté.
Et je m'achemine
Vers de nouveaux toits.
Tandis que la voix
Sourde et clandestine
Des cloches de bois
Chante ma débine.
13
2i8 Chansons vécues
— Pierrot, de ta belle,
Je cherche et ne vois
Le fripon minois :
Colombine est-elle,
Encore une fois,
Amante infidèle?
— Las ! en sa rapine
Voulant s'octroyer
Le prix du loyer,
Le vieux, j'imagine,
A dans son foyer
Gardé Colombine !
Publiée avec l'autorisation de M. C. JOUBERT, éditeur de musique,
25, rue d Hauteville, Paris. Tous droits de traduction, de reproduction
et d'exécution réser\'és pour tous pa5-s. Prix du fascicule avec accompa-
gnement de piano 3 francs.
PETITS CONSEILS
A Madame Marguerite Olagnier,
en affectueux souvenir.
Andantino
De nouveaux es - poirs gi:é_ri_ront ton
ra/l. ' .9(
cœup, ou
220 Chansons vécues
Si le doute horrible envahit ton cœur,
Seule en ton esprit que la fierté règne;
De nouveaux espoirs guériront ton cœur :
Dédaigne !
Si la trahison dévaste ton cœur,
Qu'aux pensers cléments ton esprit se donne
De nouveaux aveux rempliront ton cœur :
Pardonne !
Si le noir souci désole ton cœur,
Laisse en ton esprit la douleur se taire ;
De nouveaux désirs griseront ton cœur :
Espère !
Petits Conseils 221
Si le désespoir terrasse ton cœur,
Garde ton esprit de toute folie ;
Un nouvel amour naîtra dans ton cœur :
Oublie !
Publiée avec l'autorisation d'Alfred RABUT, éditeur, 13, rue Gentil,
Lyon.
13-
CHANSON DU SOMMEIL
A mon vieil ami Condamin, en affectueux
Andan(ino
dolre
_ DOS, C'est fuir do l.i pn . son ou nous tient le re .
- prit s'en.voJer vers un ciel Pur des nu.a-ges
rail.
lourds de nos douleurs an - cuiti - nés.
224 Chansons véciiei
Dormir, c'est oublier le temps mort et ses peines,
Cest fuir de la prison où nous tient le Réel,
C'est laisser notre esprit s'envoler vers un ciel
Pur des nuages lourds de nos douleurs anciennes.
Dormir, c'est arrêter en sa fébrile course,
Notre vie enchaînée au labeur coutumier,
C'est rafraîchir nos sens à l'ombre d'un palmier
Dont le feuillage abrite une idéale source.
Dormir, c'est explorer le pays des mystères.
C'est de notre avenir pénétrer les secrets,
C'est de notre destin présager les décrets.
C'est insuffler la vie à toutes nos Chimères!
Publiée avec rautorisation d'Alfred RABUT, éditeur, i3, rue Gen;
Lyon.
TABLE DES MATIÈRES
Pages
Pressentiment 3
L'Amante 9
L'Intrus 15
La Morte 19
Le Silence 23
La Mission 29
Solitude 33
Prière 37
Consolation 41
Anniversaire 45
Aubade à l'Amante 53
Le réveil de l'Amante 57
Les cheveux de l'Amante 61
Le front de TAmante 65
Les yeux de l'Amante 69
Les lèvres de l'Amante 73
La voix de l'Amante 77
Les mains de l'Amante 79
Le sommeil de l'Amante 83
Sérénade à l'Amante 87
La nouvelle Amante 93
22é Table des Matières
Pages
Le Refuge 97
Promenade en mer loi
Absence 105
Ennui 109
Attente 113
Retour 117
Tempête 121
Coucher de Soleil 12$
Accalmie 129
Chanson sur un vieil air 135
Pays de Cocagne 141
L'Étendard 147
Chanson des Fossettes 151
Petite Guerre . ' 157
Mon Musée t6i
Lilas 167
Roses 169
Violettes 173
Marguerites 175
Myosotis 179
Pensées 183
Chanson du Crépuscule 189
Prière d'Amour 193
Chanson du Fil 195
Pierrot infidèle 201
Pierrot chante 209
Le déménagement de Pierrot 215
Petits conseils ... 219
Chanson du Sommeil 223
EVREUX, IMPRIMERIE DE CHARLES HERISSET
La Bibliothèque
Université d'Ottawa
Echéance
The Library
Univers! ty of Ottawa
Date Due
JUL07'80
\k^
J^
a39003 00350816^b
J
CE PC 2631
•R4^AC48 1S03
COO PRIVAS, XAVI
ACC# 1239423
CHANSCNS VEC
Les C lillHIiliiilllllillilllii a Jour
COLL ROW MODULE 8HELF BOX POS C
333 02 10 11 12 19 2
^MSgS.
XAVIER PRIVAS
Q\)\n)ér\qucs
HENRI FURSY
De la ^oîte
ANDRÉ BARDE
Jeu De ^assacre
GABRIEL MONTOYA
La pdle (^1)31)501)
EMILE ANTOINE
Q\)3t)sot)S De (}œur
ilLNRY DE FLEURIGNY
(Chansons
De la \)îe
sont les
plus récents Succès
DE LA
Librairie Ollendorff
Ï410 — Pans. — lirir. Hi^mmcrlé ei C'«